Le chant, c’est l’homme : il
nous dit quelque chose de lui, de ses aspirations les plus intimes, et,
par sa forme, de sa culture. Tous les peuples de la terre, de tous les
temps que Dieu fit, ont exprimé leur foi et l’élévation de leur âme par
le chant. La mélodie véhicule le verbe dans une forme caractéristique
qui unit trois éléments complémentaires, rythme, dynamique et modulation
des hauteurs. En un sens, la parole elle-même contient ces trois
éléments, même si l’on doit admettre que la langue italienne, par
exemple, est plus séduisante à cet égard que d’autres, en apparence plus
monotones. Mais le chant amplifie et, pourrait-on dire, transcende la
parole. Il lui apporte aussi une part de subjectivité, un libre
commentaire, qui peut aller dans certains cas jusqu’à s’opposer
radicalement au contenu qu’il est censé porter. C’est pourquoi saint
Augustin dit que « bien chanter » et non pas simplement « chanter », à
savoir produire une musique de qualité, c’est effectivement « prier deux
fois ».
Le chant a donc été et demeurera l’un
des modes d’expression privilégiés de la foi chrétienne, de sa
transmission, et, pourrait-on dire, de sa pédagogie. En remontant sous
une forme un peu libre et rapide les siècles, nous allons voir
apparaître un certain nombre de problématiques et de contradictions au
sein même de ses beautés. Elles sont liées à notre nature humaine
elle-même, et il n’est pas indifférent de nous arrêter un peu pour
méditer in fine sur le souvenir et l’avenir de notre chant chrétien.
Je commencerai par un
hommage, et citerai Benoit XVI, le pape le plus musicien que nous avons
eu le bonheur d’écouter et de suivre, qui dit ceci lors de
l’inauguration du collège des Bernardins en 2008 :
« La Parole de Dieu elle-même nous introduit dans un dialogue avec Lui. Le Dieu qui parle dans la Bible nous enseigne comment nous pouvons Lui parler. En particulier, dans le Livre des Psaumes, il nous donne les mots avec lesquelles nous pouvons nous adresser à Lui. Dans ce dialogue, nous Lui présentons notre vie, avec ses hauts et ses bas, et nous la transformons en un mouvement vers Lui. Les Psaumes contiennent en plusieurs endroits des instructions sur la façon dont ils doivent être chantés et accompagnés par des instruments musicaux. Pour prier sur la base de la Parole de Dieu, la seule labialisation ne suffit pas, la musique est nécessaire. Deux chants de la liturgie chrétienne dérivent de textes bibliques qui les placent sur les lèvres des Anges : le Gloria qui est chanté une première fois par les Anges à la naissance de Jésus, et le Sanctus qui, selon Isaïe 6, est l’acclamation des Séraphins qui se tiennent dans la proximité immédiate de Dieu. Sous ce jour, la Liturgie chrétienne est une invitation à chanter avec les anges et à donner à la parole sa plus haute fonction. À ce sujet, écoutons encore une fois Jean Leclercq : « Les moines devaient trouver des accents qui traduisent le consentement de l’homme racheté aux mystères qu’il célèbre : les quelques chapiteaux de Cluny qui nous aient été conservés montrent les symboles christologiques des divers tons du chant » Pour saint Benoît, la règle déterminante de la prière et du chant des moines est la parole du Psaume : Coram angelis psallam Tibi, Domine – en présence des anges, je veux te chanter, Seigneur (cf. 138, 1). Se trouve ici exprimée la conscience de chanter, dans la prière communautaire, en présence de toute la cour céleste, et donc d’être soumis à la mesure suprême : prier et chanter pour s’unir à la musique des esprits sublimes qui étaient considérés comme les auteurs de l’harmonie du cosmos, de la musique des sphères. À partir de là, on peut comprendre la sévérité d’une méditation de saint Bernard de Clairvaux qui utilise une expression de la tradition platonicienne, transmise par saint Augustin, pour juger le mauvais chant des moines qui, à ses yeux, n’était en rien un incident secondaire. Il qualifie la cacophonie d’un chant mal exécuté comme une chute dans la regio dissimilitudinis, dans la ‘région de la dissimilitude’. Saint Augustin avait tiré cette expression de la philosophie platonicienne pour caractériser l’état de son âme avant sa conversion (cf. Confessions, VII, 10.16) : l’homme qui est créé à l’image de Dieu tombe, en conséquence de son abandon de Dieu, dans la ‘région de la dissimilitude’, dans un éloignement de Dieu où il ne Le reflète plus et où il devient ainsi non seulement dissemblable à Dieu, mais aussi à sa véritable nature d’homme. Saint Bernard se montre ici évidemment sévère en recourant à cette expression, qui indique la chute de l’homme loin de lui-même, pour qualifier les chants mal exécutés par les moines, mais il montre à quel point il prend la chose au sérieux. Il indique ici que la culture du chant est une culture de l’être et que les moines, par leurs prières et leurs chants, doivent correspondre à la grandeur de la Parole qui leur est confiée, à son impératif de réelle beauté. De cette exigence capitale de parler avec Dieu et de Le chanter avec les mots qu’Il a Lui-même donnés, est née la grande musique occidentale. Ce n’était pas là l’œuvre d’une « créativité » personnelle où l’individu, prenant comme critère essentiel la représentation de son propre moi, s’érige un monument à lui-même. Il s’agissait plutôt de reconnaître attentivement avec les « oreilles du cœur » les lois constitutives de l’harmonie musicale de la création, les formes essentielles de la musique émise par le Créateur dans le monde et en l’homme, et d’inventer une musique digne de Dieu qui soit, en même temps, authentiquement digne de l’homme et qui proclame hautement cette dignité. »
Jésus lui-même chantait les psaumes avec
ses disciples disent les Ecritures. Nul ne peut affirmer aujourd’hui de
quelle manière, sur quelle mélodie, mais nous disposons aujourd’hui de
manuscrits très anciens, contemporains à trois siècles près de ces
évènements, et notamment de quelques exemples éloquents de du diocèse de
Milan. La mélodie de l’hymne Veni redemptor gentium attribuée à
saint Ambroise au IVème siècle connut un destin long et mouvementé.
Elle est encore chantée aujourd’hui dans le Milanais lors du premier
dimanche de l’Avent, deux semaines avant l’Eglise catholique romaine.
Cette mélodie toute simple, en quatre phrases, dont la dernière reprend
simplement le profil initial porte un texte d’une intense poésie qui
emprunte à Isaïe, aux Evangiles et au Psaume 19, en évoquant le thème de
l’époux mystique qui s’élance, comme un soleil. La Réforme protestante
va s’emparer de ce poème mystique, en ayant pris le soin de simplifier
sa rythmique trop souple à leur goût et traduit le texte en langue
vernaculaire ; ce qui donnera le célèbre choral Nun komm der Heiden Heiland sur
lequel Bach élaborera deux cantates et pas moins de cinq chorals pour
l’orgue. Nous chantons encore aujourd’hui, dix-sept siècles plus tard
les contours de l’hymne de saint Ambroise de Milan sous diverses
adaptations telles que Toi qui viens pour tout sauver. Nous reparlerons de la Réforme un peu plus tard .

L’hymne Ave maris stella, généralement
daté du IXème siècle, est un concentré d’images merveilleuses,
véhiculées par une mélodie d’un irrésistible élan lumineux qui la
projette vers un ré aigu, comparable à un astre ardemment
désiré. « Salut, étoile des mers, auguste Mère de Dieu, salut, ô
toujours vierge, bienheureuse porte du Ciel. Vous qui avez agréé le
salut de Gabriel, daignez en changeant le nom d’Eve nous donner l’Ave de
la paix… » Toutes phrases qui, faisant le délice de Rémy de Gourmont,
auteur du Latin mystique, ont puissamment inspiré un poète comme Blaise Cendrars.
L’hymne Veni creator spiritus
est caractérisée par l’utilisation d’un autre mode (à savoir une sorte
de catalogue de sons hiérarchisés), ici le huitième, mode de sol,
particulièrement éclatant. « Viens, Esprit créateur, visite l’âme de tes
fidèles, emplis de la grâce d’En-Haut les cœurs que tu as créés. Toi
qu’on nomme le consolateur, le don du Dieu très-haut, la source vivante,
le feu, la charité, l’onction spirituelle. Tu es l’Esprit aux sept
dons, le doigt de la main du Père, Son authentique promesse, celui qui
enrichit toute prière… » Raban Maur, considéré comme son auteur, avait
imaginé ces merveilleuses métaphores, comme enrubannées par la musique,
formant un tout indéfectible.
C’est d’évidence par le
sensible, par la fécondation de l’imaginaire que les auteurs médiévaux
ont mis en œuvre ces divines mélodies. Pourtant, au IVème siècle, saint
Augustin, père de l’église -contemporain de saint Ambroise qui le
baptisa la nuit de Pâques en 387- montrait dans son ouvrage De musica
une ambition plus scientifique. Toute à la gloire d’un principe unique,
la musique obéissait à une harmonie, à des principes éternels qui
étaient considérés comme le reflet de l’harmonie de l’univers.
Hildegarde von Bingen parle de la musique comme un souvenir des
harmonies célestes (lequel éloigne d’ailleurs le Diable, ce qui relève
grandement les artistes, soit dit en passant !) Plusieurs siècles après,
le savant Marin Mersenne poursuivait, en attribuant dans L’Harmonie universelle
une note particulière à chaque planète, correspondant à la fréquence
théorique de sa rotation. La musique sacrée se situa donc pendant
longtemps à la croisée d’une vision cosmique : d’un côté elle est une
science, au même titre que l’anatomie ou l’astronomie, de l’autre, elle
est l’expression d’un mouvement particulier de l’âme vers son créateur.
Les astres, les jours de la semaine, les cycles lunaires, les sept notes
de la gamme, tout s’ordonne de fait autour de données invariables, et
la Vierge Marie, « la lune sous ses pieds, ayant le soleil pour
manteau » comme l’évoque le Livre de l’Apocalypse,
est souvent associée musicalement à des symboles lunaires, comme les
quatre cycles de variations totalisant vingt-huit séquences (donc
vingt-huit nuits) dans la Passacaille de Buxtehude.
Mais l’Eglise connaît des
soubresauts impressionnants au cours de son histoire. Et à plusieurs
reprises apparaît le désir de reconquérir les fidèles, ou du moins de ne
pas les perdre, de ne pas les laisser s’éloigner trop longtemps. Il
faut d’abord évoquer le bouleversement que constitua la Réforme en ce
domaine. Luther dit à la fin de 1523 : « J’ai l’intention, à l’exemple
des prophètes et des anciens Pères de l’Eglise, de créer des psaumes
allemands pour le peuple, c’est-à-dire des cantiques spirituels, afin
que la Parole de Dieu demeure parmi eux grâce au chant. » A sa suite,
s’inspirant des mélodies latines, du chant populaire, inventant,
composant aussi, et à sa suite de nombreux auteurs. On fonda des Ecoles
Latines dans toute l’Europe du Nord, destinées à diffuser la sainte
doctrine par un enseignement de qualité, reposant sur la pratique du
chant. De nombreux musiciens y furent formés, comme le jeune Johann
Sebastian Bach. Un nouveau monde était né.
La Contre-Réforme connut à sa suite un
mouvement de créativité musicale en faveur de chants assez simples, ou
de motets plus savants en langue du pays. L’un des genres les plus
populaires, y compris dans les milieux défavorisés, était celui du Noël que l’on chantait sur des mélodies profanes. Les Bibles de Noël
proposaient tel ou tel texte sur des airs de chansons alors connues de
tous. Cette question de l’intrusion dans l’espace sacré d’un air connu
pour tout dire, plutôt inapproprié, était récurrente, et le concile de
Trente avait déjà tenté d’y mettre bon ordre. Passe encore que l’on
chante sur un air de chasse ou même sur une danse paysanne, mais que
penser d’une chanson grivoise ou d’un air à boire pour invoquer la
Vierge Marie ? D’évidence, le peuple chrétien ne manquait pas d’être
distrait… Aussi l’antique chant grégorien, appelé Plain-Chant, a-t-il
été transmis envers et contre tout comme une valeur sûre. Mais que
n’avait-il été transformé, alourdi, simplifié, jusqu’à la réforme dite
de Solesmes au XIXe siècle, qui tenta de lui rendre sa forme
originelle. Peu apprécié, parfois même détesté, le Plain-Chant était
parfois encadré de versets dans le style de l’opéra italien, et il
n’était pas rare d’entendre un air de Guillaume Tell ou du Trouvère
revêtu de paroles sacrées ou paraphrasé à l’orgue, jusqu’au Moto
proprio de 1905 qui tenta de mettre un peu d’ordre dans des pratiques
il est vrai peu dignes de la transmission de la foi chrétienne.
Faite pour être chantée, la
musique vocale peut aussi avoir vocation à être écoutée. Il faut
souligner d’ailleurs que, globalement, l’assemblée chantait rarement
jusqu’à une époque récente. Aussi les compositeurs de musique sacrée
ont-ils pu dépasser un certain nombre de problématiques liées à
l’utilisation de mélodies plus ou moins populaires. Celles-ci
connaissent parfois des pérégrinations inattendues sous la plume
d’auteurs de génie. Ainsi la petite intonation du Magnificat, dite Tonus perigrinus parce qu’elle partait d’un mode pour arriver dans un autre, a-t-elle donnée en Allemagne la mélodie toute simple du choral Meine Seele erhebt den Herren
(Mon âme exalte le Seigneur) qu’Heinrich Schütz développa avec toute la
virtuosité et la sensibilité du style italien des années 1610, qu’il
maîtrisait à merveille. Plus de cent-cinquante ans après, Mozart dresse
un décor pathétique et poignant au début de son Requiem, avant que
n’entre une lumineuse voix de soprano solo sur les mots « Te decet
hymnus Deus in Sion » (Dieu, c’est en Sion qu’on chante dignement tes
louanges à Jérusalem) ; et, se souvenant de la « fille de Sion », Mozart
fait chanter ces paroles sur la musique de ce même Magnificat.
On voit par superposition la subjectivité qu’apporte la musique et,
partant, sa dimension pédagogique : transmission s’adressant d’abord au
sensible, puis à la raison, ce qui rend la musique de Mozart accessible
et compréhensible par toutes les catégories de la société.
Indépendamment des formes liturgiques, le prêtre romain Saint Philippe
Néri imagina d’illustrer dans de grandes formes musicales des passages
significatifs de l’histoire sainte. L’oratorio allait voir le jour,
parodiant les plus beaux opéras de Venise ou de Florence, essaimant
rapidement jusqu’à l’Allemagne et l’Angleterre. On peut citer l’Opéra du
marché aux oies à Hambourg où furent donnés des œuvres originales
basées sur l’Ecriture, ou les Concerts du Soir de Lübeck pour lesquels
Buxtehude composa une cantate mystique sur la parabole des vierges sages
et des vierges folles, qui comptait dans sa distribution le personnage
allégorique de l’Église.
Expression plurielle de la
foi, le chant s’adapte volontiers à son époque. Ainsi les régimes
monarchiques ont-ils conditionné des chants hiératiques, en langue
latine, s’imposant parfois comme des dogmes au travers de leur réelle
poésie, cependant que des nations plus éclatées politiquement ont
favorisé des mélodies simples, reprises par une assemblée. Aujourd’hui,
nos sociétés démocratiques, favorisant paradoxalement un certain repli
communautaire, sont le creuset d’une multitude de modes d’expression,
correspondant à la liberté et la sensibilité de chacun : tradition
latine, pop musique, rock, rap chrétien, musique savante d’avant-garde,
retour à des tournures « baroques », influence du choral protestant,
variété, musiques du monde… Un exemple intéressant et transversal est
sans doute le corpus mis au point par le père Gouzes et le frère Daniel
Bourgeois pour l’abbaye de Sylvanès. Se saisissant de la beauté
singulière des polyphonies orthodoxes (en fait créées assez tardivement
dans l’enthousiasme de la découverte de la musique italienne), et des
chorals harmonisés par Bach, ces auteurs ont imaginé des chants en
langue française dans une élégante polyphonie a cappella.
Au milieu de cette production artistique
variée où chacun espère trouver son compte, les nouvelles communautés
dites charismatiques proposent de leur côté un répertoire liturgique
identitaire, volontiers exclusif, véritable vitrine de leurs valeurs.
Tour à tour sentimental ou fortement rythmé, immédiatement séduisant, il
est souvent basé sur des textes de la Bible ou des Pères de qui sont
traduits le plus souvent dans une forme musicale étrangement
inappropriée, à l’instar des mélodies jadis vilipendées par le Concile
de Trente ou le Moto proprio. Problème récurrent donc, qui trouve ici
une énième déclinaison, et nous porte à réfléchir ; une église qui
chante, qui frappe dans ses mains, qui danse, c’est certes réconfortant,
mais après ? Mais plus loin ? Quel chant voulons-nous partager pour
exprimer et pour transmettre notre foi, la foi de l’Église, pour
découvrir malgré nous quelque chose qui nous dépasse, qui dépasse la
simple joie de se retrouver rassemblés ? Riche d’un passé glorieux et
diversifié, l’Église est souvent oublieuse des beautés qu’elle a pu
susciter, et ne s’indigne pas que ce patrimoine se déplace
systématiquement au concert, qui n’est pas vraiment sa place ! Debussy
disait un jour à propos de la musique sacrée qu’« il n’y a qu’à se
baisser pour la ramasser », s’empressant d’ajouter que c’était toujours à
son goût- la pire que l’on servait durant les offices. Constat un peu
sévère, certainement, de la part d’un artiste évidemment exigeant
-d’ailleurs avant tout avec lui-même- mais tellement parfaitement et
simplement argumenté. Ce débat reste ouvert, et la nouveauté, ne
l’oublions pas, vient toujours « comme un voleur dans la nuit ».
Car au-delà de ces
considérations toujours délicates et téméraires sur l’état actuel de
notre art, se pose le problème de la mémoire. Nos pratiques reposent sur
des rituels, et notre foi a été collectivement enrichie et transmise
par tout un corpus, constitué par accumulation et élimination. Quel choc
j’ai ressenti lorsque j’ai découvert la beauté voluptueuse des
introïts, des antiennes et des offertoires en langue latine, moi qui ne
pratique pas les langues mortes et étais plutôt un adolescent réticent à
ce patrimoine inestimable qui nous a été transmis malgré toutes les
vicissitudes de notre histoire, avec leurs mélodies enivrantes. Quelle
étonnante poésie, qui, longtemps après l’avoir fréquentée, laisse encore
résonner en moi les élans de ces cris intimes vers Dieu ! Et
sincèrement, j’avoue être troublé que l’Eglise, si parfaite pédagogue
quant à la transmission de l’Ecriture, nous prive, depuis déjà plusieurs
générations, de la simple entrevue tel trésor ! Et que dire aussi de
l’intense créativité qui a été mise en œuvre depuis le Concile ? Au
milieu de chants maladroits, ou aux formules quelquefois outrancières,
combien de belles réalisations, de mélodies profilées avec une réelle
inspiration mélodique influencée par des chants populaires bretons, par
de beaux gospels ou des chorals allemands, comme ce fut le cas à
Saint-Séverin ? Comment rester créatif en gardant en mémoire le meilleur
de cette période, car Dieu sait que le présent est déjà le passé (saint
Augustin disait même que « s’il était présent sans voler au passé, il
ne serait plus temps ! »)… Une forme reste à trouver, pour concilier (au
sens le plus noble du terme) ces répertoires de grande qualité, surtout
lorsqu’ils sont écrits par d’authentiques musiciens et inspirés par de
véritables poètes… afin de ne pas rester trop durablement à côté de ce
qui a contribué pendant des siècles à former notre identité de Peuple de
Dieu : soyons imaginatifs et curieux de beauté !
© Eric Lebrun - février 2013